Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/155

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personnage masculin qui parlât d’elle. Belle, jolie voix, jeune, et elle ne fait de mal à personne ; il faut seulement la laisser tranquille. » Mais bien qu’on la laissât tranquille elle ne pouvait être calme et aussitôt le sentait.

La porte du perron s’ouvrit dans le vestibule ; quelqu’un demanda si l’on était à la maison. Des pas se firent entendre. Natacha se regardait dans le miroir mais ne se voyait pas. Elle entendait des sons dans l’antichambre. Quand elle s’aperçut, son visage était pâle. C’était lui. Elle en était sûre, bien qu’elle entendît à peine le son de sa voix à travers les portes fermées.

Pâle et effrayée, elle accourut au salon.

— Maman ! Bolkonskï est arrivé ! Maman, c’est terrible, c’est insupportable ! Je ne veux pas… me tourmenter ! Que dois-je faire ?

La comtesse n’avait pas le temps de lui répondre que déjà le prince André, le visage troublé et sérieux, entrait au salon.

Aussitôt qu’il aperçut Natacha, son visage s’éclaira. Il baisa la main de la comtesse, celle de Natacha et s’assit sur le canapé :

— Il y a longtemps que nous n’avons pas eu le plaisir… commença la comtesse, mais le prince André l’interrompit en répondant à sa question, pressé évidemment de dire ce qu’il lui fallait.

— Je ne suis pas venu chez vous de tout ce temps, parce que j’étais chez mon père. J’avais