Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/376

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sentait presque amoureuse de cette femme si belle et si simple.

Hélène, de son côté, admirait sincèrement Natacha et désirait la divertir. Anatole lui avait demandé de le mettre en présence de Natacha, c’est pourquoi elle était venue chez les Rostov. L’idée de rapprocher son frère et Natacha l’amusait.

Bien qu’elle eût eu du dépit contre Natacha, parce qu’à Pétersbourg elle lui avait ravi Boris, maintenant elle n’y pensait plus, et, de toute son âme, désirait du bien à Natacha. En quittant les Rostov, elle prit à part sa protégée.

— Hier mon frère a dîné chez nous ; nous mourions de rire : il n’a rien mangé et soupire après vous, ma belle. Il est fou, mais fou amoureux de vous, ma chère.

À ces paroles, Natacha rougit profondément.

— Comme elle rougit, comme elle rougit, ma délicieuse ! si vous aimez quelqu’un, ma délicieuse, ce n’est pas une raison pour se cloîtrer, si même vous êtes promise, je suis sûre que votre promis aurait désiré que vous alliez dans le monde en son absence, plutôt que de périr d’ennui : Venez absolument, prononça Hélène.

« Alors elle sait que je suis fiancée ; avec son mari, avec Pierre, ce juste Pierre, ils causent de cela et en rient. Alors ce n’est rien. » Et de nouveau, sous l’influence d’Hélène, ce qui, auparavant lui semblait terrible, lui paraissait maintenant