Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/82

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et le comte n’avait pas encore décidé la question de la dot et n’en avait même pas parlé à sa femme. Tantôt il voulait donner à Véra le domaine du gouvernement de Riazan, tantôt vendre la forêt, tantôt emprunter de l’argent en souscrivant des billets à ordre. Quelques jours avant le mariage, Berg entra de bonne heure dans le cabinet de travail du comte et, avec un sourire aimable, demanda respectueusement à son futur beau-père de lui dire ce qu’il donnerait à la comtesse Véra.

Le comte était si confus de cette question, attendue depuis longtemps, qu’il répondit sans réfléchir la première chose qui lui vint en tête.

— J’aime que tu te soucies… J’aime… tu seras content… Et en frappant Berg sur l’épaule, il se leva, désirant finir cette conversation. Mais Berg, en souriant agréablement, déclara qu’il n’était pas sûr de ce qu’on donnerait à Véra et voulait au moins connaître d’avance la part qu’on lui destinait ; sinon il serait forcé de se retirer.

— Car, jugez vous-même, comte, si je me permettais de me marier sans avoir des moyens assurés d’entretenir ma femme, j’agirais lâchement…

La conversation finit par ceci, que le comte, pour être magnanime et ne pas subir de nouvelle demande, dit qu’il donnerait un billet à ordre de quatre-vingt mille roubles. Berg sourit doucement, baisa respectueusement l’épaule du comte, dit qu’il était très reconnaissant mais qu’il ne