Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Natacha pensait parfois qu’il ne voulait pas la voir et ses suppositions se confirmaient par le ton triste que prenaient les plus âgés pour l’excuser.

— Au jour d’aujourd’hui, on ne se rappelle plus les vieux amis, disait la vieille comtesse, quand on parlait de Boris.

Anna Mikhaïlovna, qui ces derniers temps fréquentait moins les Rostov, se montrait tout particulièrement digne, et chaque fois parlait avec enthousiasme et reconnaissance des qualités de son fils et de sa carrière brillante. Quand les Rostov s’installèrent à Pétersbourg, Boris vint leur faire visite.

Il alla chez eux non sans émotion. Le souvenir de Natacha était le souvenir le plus poétique de sa vie, mais en même temps il y allait avec l’intention ferme, de faire nettement sentir à Natacha et à ses parents que ses relations enfantines avec Natacha ne pouvaient être une obligation ni pour lui ni pour elle. Lors, il avait une situation brillante dans la société, grâce à son intimité avec la comtesse Bezoukhov, une situation brillante dans l’armée, grâce à la protection d’un haut personnage dont il avait gagné la confiance, et il avait des projets naissants de mariage, aisément réalisables, avec l’un des plus riches partis de Pétersbourg. Quand Boris entra dans le salon des Rostov, Natacha était dans sa chambre. Dès