Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol1.djvu/334

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larmes. Va-t’en, que ton odeur ne soit pas ici. Et qu’as-tu trouvé de bon en lui — continua-t-elle en s’adressant à Macha. — Est-ce que ton oncle ne t’a pas assez battue aujourd’hui, pour lui ? Non, toujours la même chose : « Je n’épouserai personne sauf Vassili Grouskov. » Sotte !

— Et je n’épouserai personne, je n’aime personne, qu’il me batte jusqu’à la mort à cause de lui ! — dit Macha, en versant subitement des larmes.

Longtemps je regardai Macha, qui, allongée sur le coffre, essuyait ses pleurs avec son fichu. En m’efforçant, par tous les moyens, de changer d’opinion sur Vassili, je voulais trouver ce pourquoi il lui semblait si attrayant. Mais j’avais beau compatir très franchement à sa douleur, je ne pouvais nullement comprendre pourquoi une créature si charmante que me semblait Macha pouvait aimer Vassili.

« Quand je serai grand, » — raisonnai-je en entrant chez moi, — Petrovskoié sera ma propriété, Vassili et Macha seront mes serfs, je serai assis dans mon cabinet et je fumerai ma pipe. Macha repassera au fer dans la cuisine. Je dirai : « Envoyez-moi Macha ». Elle viendra, et personne ne sera dans la chambre… Subitement entrera Vassili et quand il verra Macha, il dira : « Je suis perdu ». Et Macha pleurera aussi, et moi je dirai : « Vassili ! je sais que tu l’aimes et qu’elle t’aime. Eh bien ! te