Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/170

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à la fleur de l’âge et plein de forces, ou un jeune homme comme toi, qui n’a pas encore goûté à la vie et qui ignore ce qu’il désire, ne peut se soumettre à leur loi, car cette loi est établie non selon la nature humaine, mais selon des raisonnements spécieux. Si tu vas chez les chrétiens tu souffriras comme maintenant, et même davantage. Jusqu’ici, tes passions t’ont égaré et t’ont poussé dans une voie fausse, mais tu peux encore réparer ta faute, ce qui ne t’empêchera pas cependant de satisfaire tes passions et de jouir de la vie. Parmi eux, au contraire, réfrénant tes passions, tu seras dans la même erreur, mais de plus à cette souffrance s’ajoutera celle des besoins humains non satisfaits. Donnez un libre cours aux eaux, elles arrosent la terre, font pousser les plantes, abreuvent les bestiaux, fertilisent les pâturages ; endiguez-les, elles creusent le sol et se transforment en boue. Il en est ainsi des passions. La doctrine des chrétiens qui règle leur vie, à l’exception de certaines croyances qui les consolent et les réconfortent, et dont je ne parlerai pas, se résume dans les préceptes suivants : ne pas admettre la violence, ni la guerre, ni les tribunaux, nier la propriété, et les arts et les sciences, en un mot, tout ce qui tend à rendre la vie agréable. Tout cela irait bien, si tous les hommes étaient tels que leur Maître. Mais cela n’est pas et ne peut être. Les hommes sont méchants et esclaves de leurs pas-