Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

besoin pour vivre. Vivant en commun, nous pouvons, par le travail de nos mains, soutenir nos enfants et nos vieillards, nos malades et nos infirmes. Tu prétends que nous, chrétiens, éveillons dans le coeur d’un esclave le désir d’égaler César. Au contraire, par la parole et l’exemple nous ne prêchons qu’une chose : l’humilité patiente et le travail, le plus humble travail, celui du journalier. Des affaires de l’État, nous ne savons et ne comprenons absolument rien. Mais nous savons parfaitement et indubitablement que notre bonheur ne se trouve que là où se trouve le bonheur des autres, et c’est lui que nous cherchons. Le bonheur des hommes se trouve dans leur union.

— Mais dis-moi, Pamphile, pourquoi les hommes vous sont-ils hostiles, vous persécutent-ils, vous chassent-ils, vous tuent-ils, pourquoi de votre doctrine de l’amour résulte-t-il la haine ?

— Cela ne tient pas à nous ; c’est étranger à nous. Nous plaçons au-dessus de tout la loi de Dieu qui gouverne notre conscience et notre raison. Nous ne pouvons exécuter que les lois d’État qui ne sont pas contraires à la loi divine. Ce qui est à César est à César. Ce qui est à Dieu est à Dieu. C’est pourquoi les hommes nous persécutent. Nous n’avons pas la possibilité de faire cesser cette hostilité qui se manifeste contre nous, et qui ne vient pas de nous, parce que nous ne pouvons pas cesser de comprendre la vérité que nous avons comprise.