Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/247

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— Celle-ci : la femme doit craindre son mari. Voilà quelle crainte.

— Ça, cher monsieur, c’est fini, dit la dame, avec un mouvement d’humeur.

— Non, madame, cela ne peut pas finir. Ève, la première femme, a été tirée de la côte de l’homme, et cela restera vrai jusqu’à la fin du monde, dit le vieux, en secouant la tête d’un air si grave et victorieux que le commis, décidant que la victoire restait de son côté, éclata d’un rire sonore.

— Oui, c’est vous, les hommes, qui jugez ainsi, répliqua, en se tournant vers nous, la dame qui ne voulait pas céder ; vous gardez pour vous la liberté, et la femme vous voulez la retenir dans le gynécée. À l’homme, naturellement, tout est permis.

— Personne ne lui donne cette permission, seulement, si l’homme se conduit mal au dehors, la famille n’en est pas augmentée ; mais la femme, l’épouse, c’est un vase fragile, continua sévèrement le marchand.

Son intonation autoritaire en imposait évidemment aux auditeurs, et même la dame se sentait vaincue, mais elle ne se rendait pas.

— Oui ; mais vous admettez, je pense, que la femme est un être humain qui a des sentiments comme son mari. Alors que doit-elle faire si elle n’aime pas son mari ?

— Elle ne l’aime pas ! répéta sévèrement le vieillard en fronçant les sourcils. On le lui fera aimer !