Page:Tolstoï - A la recherche du bonheur.djvu/14

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Le corbeau disait :

— C’est de la faim que vient le mal. Quand tu manges à ta faim, perché sur une branche et croassant, tout te semble riant, bon et joyeux ; mais reste seulement deux journées à jeun, et tu n’auras même plus le cœur de regarder la nature ; tu te sens agité, tu ne peux demeurer en place, tu n’as pas un moment de repos ; qu’un morceau de viande se présente à ta vue, c’est encore pis, tu te jettes dessus sans réfléchir. On a beau te donner des coups de bâton, te lancer des pierres ; chiens et loups ont beau te happer, tu ne lâches pas. Combien la faim en tue ainsi parmi nous ? Tout le mal vient de la faim.

Le pigeon disait :

— Et pour moi, ce n’est pas de la faim que vient le mal ; tout le mal vient de l’amour. Si nous vivions isolés, nous n’aurions pas tant à