Page:Tolstoï - A la recherche du bonheur.djvu/144

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l’étranger. Et une grande pitié la prit ; elle se mit à aimer ce malheureux. Aussitôt l’étranger devint plus gai, et, relevant la tête, regarda la pauvre femme avec un sourire. Le souper fini, la baba rangea la vaisselle et dit :

— D’où viens-tu ?

— Je ne suis pas d’ici.

— Comment es-tu tombé là ?

— Je ne puis le dire.

— Qui t’a dépouillé ?

— Dieu m’a châtié.

— Et c’est ainsi, tout nu, que tu restais ?

— C’est ainsi, tout nu, que je restais. Je gelais, Sémen m’a vu, a eu pitié ; il m’a mis son caftan, m’a dit de le suivre. Toi, tu as eu compassion de ma misère, tu m’as fait manger et boire : que Dieu vous bénisse !

Matréna se leva, ouvrit son coffre en retira la vieille chemise de Sémen qu’elle avait rapiécée pour le lendemain, prit une paire de