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pourquoi ne continuons-nous pas ? » se dit Levine, sans songer que les paysans travaillaient sans repos depuis près de quatre heures, et qu’il était temps de déjeuner.

« Il faut manger, Barine, dit le vieux.

— Est-il déjà si tard ? En ce cas, déjeunons. »

Levine rendit sa faux à Tite, et, traversant avec les paysans la grande étendue d’herbe fauchée que la pluie venait d’arroser légèrement, il alla chercher son cheval, tandis que ceux-ci prenaient leur pain déposé avec les caftans sur l’herbe. Il s’aperçut alors qu’il n’avait pas bien prévu le temps et que son foin serait mouillé.

« Le foin sera gâté, dit-il.

— Il n’y a pas de mal, Barine : fauche à la pluie, fane au soleil », dit le vieux.

Levine détacha son cheval et rentra prendre du café chez lui. Serge Ivanitch venait seulement de se lever ; avant qu’il fût habillé et eût paru dans la salle à manger, Constantin était retourné à la prairie.


CHAPITRE V


Après le déjeuner, Levine, en reprenant l’ouvrage, prit place entre le grand vieillard facétieux, qui l’invita à être son voisin, et un jeune paysan marié depuis l’automne, qui fauchait cet été pour la première fois.