« Tant pis pour vous ! Bogdanitch est rancunier ; vous payerez cher votre obstination.
— Je vous le jure, ce n’est pas de l’obstination, je ne puis pas vous expliquer ce que j’éprouve… je ne le puis pas.
— Eh bien, comme il vous plaira ! Et où est-il, ce misérable ? où s’est-il caché ? demanda Kirstein, en se tournant vers Denissow.
— Il fait le malade, on le portera malade dans l’ordre du jour de demain.
— Oui, c’est une maladie : impossible de comprendre cela autrement.
— Maladie ou non, je lui conseille de ne pas me tomber sous la main, je le tuerais, » s’écria Denissow avec fureur.
En ce moment Gerkow entra.
« Toi ! dirent les officiers.
— En marche, messieurs ! Mack s’est rendu prisonnier avec toute son armée.
— Quel canard !
— Je l’ai vu, vu de mes propres yeux.
— Comment, tu as vu Mack vivant, en chair et en os ?
— En marche ! en marche ! vite une bouteille pour la nouvelle qu’il apporte ! Comment es-tu tombé ici ?
— On m’a de nouveau renvoyé au régiment à cause de ce diable de Mack. Le général autrichien s’est plaint de ce que je l’avais félicité de l’arrivée de son supérieur. Qu’as-tu donc, Rostow, on dirait que tu sors du bain ?
— Ah ! mon cher, c’est un tel gâchis ici depuis deux jours ! »
L’aide de camp du régiment entra et confirma les paroles de Gerkow.
Le régiment devait se mettre en marche le lendemain :
« En marche, messieurs ! Dieu merci, plus d’inaction ! »
VI
Koutouzow s’était replié sur Vienne, en détruisant derrière lui les ponts sur l’Inn, à Braunau, et sur la Traun, à Lintz. Pendant la journée du 23 octobre, les troupes passaient la rivière Enns. Les fourgons de bagages, l’artillerie, les colonnes de troupes traversaient la ville en défilant des deux côtés du