Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le muride d’Hadji Mourad entra, déplaçant, sans bruit et à grands pas, ses jambes fortes sur le sol d’argile. Comme l’avait fait Hadji Mourad, il ôta son manteau, son fusil, son sabre, ne gardant que son poignard et son pistolet, et les suspendit au même clou que ceux de son maître.

— Qui est-ce ? demanda le vieillard à Hadji Mourad en désignant le nouveau venu.

— Mon muride. Il se nomme Eldar, répondit Hadji Mourad.

— Bon, dit le vieux, et il indiqua une place à Eldar sur le tapis, près d’Hadji Mourad.

Eldar s’assit les jambes croisées, et fixa silencieusement ses beaux yeux de brebis sur le visage du vieillard devenu loquace. Le vieux racontait comment leur garçon avait capturé, la semaine passée, deux soldats, tué l’un et envoyé l’autre à Schamyl.

Hadji Mourad écoutait distraitement, en regardant la porte et prêtant l’oreille aux sons qui arrivaient du dehors. Sous l’auvent, devant la cabane, des pas se firent entendre ; la porte grinça, et le maître du logis entra. Il s’appelait Sado. C’était un homme d’une quarantaine d’années ; il avait une petite barbiche, le nez long, les yeux aussi noirs, bien que moins brillants, que ceux de son fils, le garçon de quinze ans qui courait derrière lui, et qui pénétra dans la cabane après son père, et s’assit près de la porte. Encore près de la porte, le patron ôta ses socques, rejeta sur sa nuque son vieux bonnet usé, découvrant ainsi sa tête qui n’avait pas été rasée depuis longtemps, et qui