Page:Tolstoï - Histoire d’un pauvre homme.djvu/19

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vaurien, mais un homme très fort. Quant à sa femme quoiqu’elle le grondât et le battît même parfois, elle pensait que c’était le premier vétérinaire et la tête la plus forte qu’il y eût au monde.

Elle le regardait avec admiration préparer sa drogue.

— Quelle tête ! Où a-t-il appris tout cela ?

Le papier dans lequel était enveloppé un des ingrédients tomba sur la table.

— Anioutka, cria-t-elle, tu vois que ton père a laissé tomber un papier.

Anioutka sortit de dessous la couverture ses petites jambes maigres, descendit avec la rapidité d’un chat, et ramassa le papier.

— Voici papa, dit-elle, en lui tendant le papier.

Puis elle courut se cacher sous la couverture.

— Tu pousses, méchante, cria la petite sœur qui partageait le lit avec elle.

— Voulez-vous vous taire ! Attendez un peu, cria la mère, et les deux têtes se cachèrent sous la couverture.

— S’il me donne trois roubles, dit Polikei en bouchant la bouteille, je guérirai son cheval. Et ce n’est pas cher du tout. Est-ce qu’ils sont capables d’inventer des drogues comme moi ! Akoulina, va demander un peu de tabac à Nikita. Je le lui rendrai demain.

Akoulina sortit sans rien bousculer, ce qui était assez difficile.

Polikei ouvrit la petite armoire, y serra sa bouteille et prit un litre vide qu’il renversa dans sa bouche, espérant trouver au fond quelques gouttes d’eau-de-vie.

Son espoir fut déçu.