Page:Tolstoï - Histoire d’un pauvre homme.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

frère a été envoyé au régiment, dit-il au vieux Doutlof, nous ne pouvons pas prendre cela en considération.

— C’est juste ! crièrent plusieurs voix.

— Qui est-ce qui est ivre ici ? répliqua Riézoun au vieux Doutlof. Est-ce toi ou tes mendiants de fils qui m’ont donné à boire ?

— Il faut en finir d’une fois, mes frères. Si vous trouvez bon de libérer Doutlof, désignez donc des familles qui n’ont que deux et même un seul garçon ; c’est lui qui va joliment se moquer de vous !

— C’est Doutlof qui doit être désigné ! Il n’y a pas à dire !

— Certainement ; ce sont les familles qui ont trois garçons, qui doivent tirer au sort, crièrent plusieurs voix.

— Nous allons voir ce que dira Madame. Iégor Ivanovitch a fait espérer qu’on désignerait un des serfs attachés à la maison, dit une voix.

Cette remarque suspendit quelques instants la discussion, mais bientôt elle recommença de plus belle ; on en vint aux personnalités.

Le fils de Doutlof, Ignate, que Riézoun avait accusé de mendier, l’accusait à son tour d’avoir volé une scie et d’avoir battu sa femme au point qu’elle avait manqué en mourir.

Riézoun répliqua que, ivre ou non, il battrait toujours sa femme, et qu’elle le méritait bien.

Cette remarque égaya la foule.

L’accusation d’avoir volé une scie mit le charpentier en colère, aussi, s’approchant d’Ignate, lui demanda-t-il :

— Qui a volé ?