Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/163

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de colère, une période d’amour faible amenait une irritation faible. Nous ne comprenions pas que cet amour, cette haine étaient le même sentiment animal, sous deux faces opposées. Vivre ainsi serait terrible si l’on s’expliquait les motifs. Mais nous ne les percevions, nous ne les analysions pas. C’est le supplice et le soulagement de l’homme que, lorsqu’il vit irrégulièrement, il peut s’illusionner sur les misères de sa situation. Ainsi fîmes-nous. Elle cherchait à s’oublier en des occupations absorbantes, hâtives, dans les soins du ménage, de l’ameublement, de son costume et de celui de ses enfants, de l’instruction de ceux-ci et de leur santé. C’étaient là des occupations qui ne ressortaient pas d’une nécessité immédiate, mais elle les accomplissait comme si sa vie et celle de ses enfants eussent dépendu du fait de ne pas laisser brûler la pâtisserie, de bien suspendre un rideau, de réussir une robe, de bien savoir une leçon ou d’avaler un remède.

Je voyais bien que, pour elle, tout cela