Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/212

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et pensais auparavant… Voilà comme il faut vivre. »

Ainsi je me parlais en mon âme en écoutant cette musique. Qu’était ce nouveau que j’apprenais ainsi ? je ne m’en rendais pas compte, mais la conscience de cet état indéfini me rendait joyeux. En cet état, la jalousie n’avait plus de place. Les mêmes figures, et dans le nombre lui et ma femme, je les voyais sous un autre jour. Cette musique me transportait dans un monde inconnu où la jalousie n’avait plus de place. La jalousie et les sentiments qui la provoquaient me paraissaient des futilités auxquelles ce n’était pas la peine de penser.

Après ce presto, ils finirent par l’andante pas très neuf, aux variations banales, et le finale faible. Puis ils jouèrent encore, à la prière des invités, tantôt une élégie d’Ernst, tantôt différents autres morceaux. Tout cela était bien, mais ne produisit pas sur moi le dixième de l’impression du début. Je me sentis léger, gai pendant toute la soirée. Quant à ma femme, jamais je ne la vis telle.