Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/30

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lanterne attachée à un poteau, et il n’a plus où aller. L’homme qui confesse la doctrine de la conscience intérieure est semblable à celui qui porte devant lui la lanterne, sur une canne plus ou moins longue : la lumière est toujours devant lui, elle le stimule toujours à la suivre, et lui découvre toujours de nouveaux espaces éclairés qui l’attirent. On dit que l’Idéal de l’Humanité ne peut pas être la chasteté et le célibat, puisque la chasteté supprime celui qui tend à l’Idéal. On ne peut donner comme Idéal de l’Espèce humaine, sa propre suppression.

Mais l’Idéal n’est idéal que s’il est inatteignable, la possibilité de l’approcher est infinie. Ainsi est l’idéal chrétien, — la formation du royaume de Dieu, l’union de tous les vivants par l’amour. — L’idée de l’atteindre n’est pas compatible avec l’idée de la vie. Quelle vie est possible quand tous les vivants seront unis par l’amour en un seul ? Aucune ! L’idée de la vie est possible seulement dans l’effort vers l’idéal inatteignable. Mais si nous admettions même que l’Idéal chrétien de la chasteté s’est réalisé, alors nous serions arrivés à des affirmations très