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Page:Tolstoï - Le Faux Coupon et autres contes.djvu/31

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Ivan Mironoff le remit au garçon et lui demanda de rapporter la monnaie. Mais le garçon ne la rapporta pas, et à sa place s’avança le patron, un homme chauve, au visage luisant, tenant le coupon dans sa main épaisse.

— Votre argent n’est pas bon, dit-il, en montrant le coupon, mais sans le remettre.

— L’argent est bon. C’est un monsieur qui me l’a donné.

— Je te dis qu’il n’est pas bon. Il est faux.

— Eh bien, s’il est faux, donne-le-moi.

— Non, mon cher. Le frère a besoin d’une leçon… Tu as fabriqué ce faux, avec des filous.

— Donne l’argent ! Quel droit as-tu ?

— Sidor ! appelle un agent, dit le cabaretier au garçon.

Ivan Mironoff avait un peu bu, et quand il avait bu, il n’était plus patient. Il saisit le cabaretier au collet, en criant :

— Donne-le ! J’irai chez ce monsieur ; je sais où il demeure.

Le cabaretier se dégagea, mais sa chemise était endommagée.

— Ah ! c’est comme ça ! Tiens-le.

Le garçon saisit Ivan Mironoff, et au même instant parut l’agent de police. Après avoir écouté comme un chef le récit de l’affaire, l’agent la résolut aussitôt :

— Au poste !

L’agent mit le coupon dans son porte-monnaie et emmena au poste Ivan Mironoff avec son attelage.