Page:Tolstoï - Le Faux Coupon et autres contes.djvu/326

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peut-être indigné d’une proposition pareille, et j’aurai honte… Mais peut-être consentira-t-il tout simplement. » Ainsi pensa-t-il en écoutant le vieux Danilo. Celui-ci racontait comment une fois il avait amené une femme à Prianitchnikoff. — « On peut se risquer, » pensa Eugène. — « Votre père, qu’il ait le royaume du ciel, ne s’occupait pas de ces bêtises… » — « On ne peut pas, » se dit Eugène. Mais pour tâter le terrain il dit : — « Comment donc t’occupais-tu de si vilaines affaires ? » — « Bah ! Qu’y a-t-il de mal ici ? Elle était contente, et Fédor Zakaritch aussi était très content, et il me donnait un rouble. Comment peut-on faire autrement ? C’est un être vivant, après tout, il boit du vin… » — « Oui, on peut lui parler, » pensa Eugène, et aussitôt il commença : — « Voilà, sais-tu, Danilo, — il se sentait rougir jusqu’aux oreilles, — je suis à bout ! » Danilo sourit. — « Après tout, je ne suis pas un moine, j’ai des habitudes… » Il sentait que ses paroles étaient stupides, mais il était content parce que Danilo approuvait.

— « Quoi, il y a longtemps que vous auriez dû dire cela. C’est faisable, dites seulement laquelle vous voulez. »

— Oh ! ça m’est égal, n’importe laquelle, pourvu qu’elle ne soit pas trop laide et qu’elle soit bien portante.

— Compris, dit Danilo. Oh ! j’ai un magnifique gibier, — Eugène rougit de nouveau, — très jolie, mariée seulement depuis l’automne.

Danilo chuchota quelque chose à Eugène, qui, de honte, fronça les sourcils.

— Non, non, dit-il, ce n’est pas du tout ce qu’il me faut. Je préfère le contraire (de quel contraire pouvait-il s’agir ?). Il me faut tout le