Page:Tolstoï - Le Prince Nekhlioudov.djvu/146

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Ma tante disait vrai : Il est plus facile de faire son propre bonheur que celui des autres… Mes moujiks sont-ils devenus plus riches ? Sont-ils instruits ? Leur être moral s’est-il développé ? Point. Eux ne s’en trouvent pas mieux ; et, à moi, la vie pèse tous les jours davantage. Si j’avais entrevu un succès quelconque à mon entreprise, si on s’était montré seulement reconnaissant de mes efforts… Mais, non, la routine, les vices, la méfiance, l’inertie subsistent, tandis que je gaspille en vain les meilleures années de ma vie. »

Tout à coup, sans savoir pourquoi, il se souvint avoir entendu dire par sa niania[1], que ses voisins l’appelaient « un enfant en retard ». Ils disaient aussi de lui qu’il n’avait plus beaucoup d’argent, que le mou-

  1. Bonne d’enfants.