Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/104

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nous ne pouvons comprendre la vie que par ces trois moyens.

Ces trois conceptions sont les suivantes :

1o Vie personnelle ou animale ; 2o vie sociale ou païenne ; 3o vie universelle ou divine.

D’après la première conception, la vie de l’homme est comprise dans sa seule personnalité ; le but de sa vie est la satisfaction de la volonté de cette personnalité. D’après la deuxième conception, la vie de l’homme est comprise non seulement dans sa seule personnalité, mais dans un ensemble et dans une gradation de personnalités : la famille, la tribu, la race, l’état. Le but de la vie consiste dans la satisfaction de la volonté de cet ensemble de personnalités. D’après la troisième conception, la vie de l’homme n’est comprise ni dans sa personnalité ni dans un ensemble et une gradation de personnalités, mais dans le principe et la source de la vie : Dieu.

Ces trois conceptions de la vie servent de base à toutes les religions qui existent ou ont existé.

Le sauvage ne reconnaît la vie qu’en lui, dans ses besoins personnels ; le bonheur de sa vie est concentré en lui seul. Le bonheur le plus grand pour lui est la satisfaction la plus complète de ses appétits. Le mobile de sa vie est son plaisir personnel. Sa religion consiste à se rendre la divinité favorable, et à se prosterner devant des dieux imaginaires qu’il ne suppose que dans un but personnel.

Le païen social reconnaît déjà la vie non pas en lui seul, mais dans un ensemble d’individus : la famille, la tribu, la race, l’état, — et sacrifie à cet ensemble son propre bonheur. Le mobile de sa vie est la gloire. Sa religion consiste dans la glorification des chefs de groupes : ancêtres, chefs de tribus, souverains, — et