Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/141

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lois sociales et politiques satisfasse aux exigences de la raison et de la nature humaines. Les hommes savent depuis longtemps déjà qu’il est déraisonnable de se soumettre à une loi dont la vérité est douteuse, et, par suite, ils ne peuvent pas ne pas souffrir en se soumettant à une loi dont ils ne reconnaissent pas la sagesse et le caractère obligatoire.

L’homme ne peut pas ne pas souffrir lorsque toute sa vie est réglée d’avance par des lois auxquelles il doit obéir sous menace de châtiment, bien que ne croyant pas à leur sagesse et à leur justice, et souvent même ayant nettement conscience de leur cruauté et de leur caractère artificiel.

Nous reconnaissons l’inutilité des douanes et des droits d’entrée, mais nous sommes obligés de les payer. Nous reconnaissons l’inutilité des listes civiles et de bien d’autres dépenses gouvernementales ; nous regardons comme nuisibles les enseignements de l’église, et nous devons participer au maintien de ces institutions. Nous reconnaissons comme cruelles et injustes les condamnations prononcées par les tribunaux, et nous sommes forcés de participer à cette justice. Nous reconnaissons comme irrégulière et funeste la distribution de la propriété rurale, et nous devons nous y soumettre. Nous ne reconnaissons pas la nécessité de l’armée et de la guerre, et nous devons supporter de terribles charges pour l’entretien des troupes et les frais de la guerre.

Mais cette contradiction est encore peu de chose comparée à celle qui se dresse devant les hommes dans leurs relations internationales et qui, sous la menace de la perte de la raison et de la vie humaine, exige une solution. C’est la contradiction entre la conscience chrétienne et la guerre.

Nous tous, peuples chrétiens, qui vivons de la même