Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/290

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droit de punir et introduisent à sa place les théories de l’irresponsabilité. Au lieu du châtiment ils préconisent la guérison des prétendus criminels par un traitement médical ou moral.

Les geôliers et les gardes-chiourmes deviennent souvent les défenseurs de ceux qu’ils ont pour mission de martyriser, et souvent les gendarmes et les détectives sauvent ceux qu’ils doivent perdre.

Le clergé prêche la tolérance, parfois même la négation de la violence, et les plus instruits de ses membres cherchent à éviter dans leurs sermons le mensonge qui est la base même de leur situation et qu’ils sont appelés à soutenir.

Les bourreaux refusent d’accomplir leur ministère, de sorte que souvent, en Russie, les arrêts de mort ne peuvent être exécutés, et que, malgré tous les avantages accordés aux forçats parmi lesquels on recrute les bourreaux, ceux qui acceptent ces fonctions deviennent de plus en plus rares.

Les gouverneurs, les commissaires, les percepteurs ont souvent pitié du peuple et cherchent toutes sortes de prétextes pour exempter les pauvres diables de l’impôt.

Les riches n’osent plus jouir de leurs richesses pour eux-mêmes uniquement, mais ils en sacrifient une partie à des libéralités.

Les propriétaires fonciers construisent sur leurs terres des hôpitaux, des écoles et quelques-uns même abandonnent leur propriété aux cultivateurs ou y établissent des colonies agricoles.

Les propriétaires d’usines et de fabriques créent, eux aussi, des hôpitaux, des écoles, des caisses de retraites, des spectacles pour leurs ouvriers. Certains forment des associations dont ils font partie au même titre et avec les mêmes droits que les autres membres.