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Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/353

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Il ressortirait de cette théorie que tous les fondateurs des religions, comme Moïse et les prophètes, Confucius, Lao-Tseu, Bouddha, le Christ et d’autres, ont prêché leurs doctrines et que leurs partisans les ont acceptées non pas parce qu’ils aimaient la vérité, mais parce que les conditions politiques, sociales et surtout économiques des peuples au milieu desquels ces doctrines ont apparu étaient favorables à leur éclosion et à leur développement.

L’action de l’homme qui désire servir la société et améliorer les conditions de la vie doit donc, selon cette thèse, être dirigée non pas vers l’éclaircissement de la vérité et son observation, mais vers l’amélioration des conditions extérieures, politiques, sociales et surtout économiques. Et la modification de ces conditions se fait en partie en servant le gouvernement et en introduisant dans l’administration des principes de libéralisme et de progrès, en partie en aidant au développement de l’industrie et en propageant les idées socialistes et principalement en concourant à la diffusion de la science.

Ce qui importe, d’après cette doctrine, ce n’est pas de professer la vérité révélée, et, par suite, de la réaliser dans la vie ou du moins ne pas commettre des actes qui lui sont contraires : servir le gouvernement, renforcer son pouvoir s’il est nuisible, profiter de l’organisation capitaliste si elle est mauvaise, témoigner du respect à certaines cérémonies si elles sont considérées comme superstitieuses, siéger dans les tribunaux si leur organisation est fausse, servir dans l’armée, jurer, mentir, s’avilir en général ; mais ce qui importe c’est, sans changer les formes actuelles de la vie et en s’y soumettant contrairement à ses convictions, introduire le libéralisme dans les institutions existantes. D’après cette théorie on peut, en restant propriétaire, négociant,