Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/86

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Pénétrer le peuple de ces formules du clergé byzantin sur la Trinité, la mère de Dieu, les sacrements, la grâce, qui n’ont plus aucun sens pour les hommes de notre temps, constitue une partie de l’action de l’église russe. L’autre partie de son action est l’appui fourni à l’idolâtrie, dans le sens propre du mot : vénération des saintes reliques et des saintes images, et sacrifices qu’on leur fait pour en obtenir la réalisation de ses désirs. Je ne parlerai pas de ce que dit et écrit le clergé russe, avec une nuance d’érudition et de libéralisme, dans les revues religieuses, mais je parlerai de ce que le clergé fait réellement sur l’immense étendue de la terre russe, au milieu d’un peuple de cent millions d’âmes. Qu’est-ce qu’on enseigne au peuple avec intensité et partout avec le même zèle ? Qu’est-ce qu’on exige de lui en vertu de la prétendue foi chrétienne ?

Je commencerai par le commencement, par la naissance de l’enfant. À la naissance de l’enfant on enseigne qu’il faut faire une prière sur le nouveau-né et sur la mère pour les purifier, car sans cette prière cette mère est impure. À cet effet, le prêtre prend dans ses bras l’enfant, et prononce des paroles sacramentelles devant les images des saints, que, dans le peuple, on appelle franchement des dieux. Il purifie ainsi la mère. Puis on inculque aux parents, on exige même d’eux, sous la menace de punitions, de baptiser absolument l’enfant, c’est-à-dire de le faire plonger par le prêtre dans l’eau, trois fois de suite, avec lecture de paroles incompréhensibles accompagnées d’actes encore plus incompréhensibles : onction de différentes parties du corps, coupe de cheveux ; les parrains soufflent et crachent contre le démon imaginaire. Tout cela doit purifier l’enfant et en faire un chrétien. Puis on enseigne aux parents qu’il faut faire communier l’enfant, c’est-à-