Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/203

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Jésus appelle les hommes à une source d’eau qui est là tout près d’eux. Les hommes sont brûlés par la soif ; ils mangent de la pourriture, ils boivent leur sang ; mais leurs docteurs leur ont dit qu’ils périraient s’ils allaient à cette source où les appelle Jésus. Et les hommes les croient ; ils se tourmentent et meurent de soif à deux pas de la source sans oser en approcher. Il suffit d’avoir foi dans les paroles de Jésus, qui dit qu’il a apporté le vrai bien sur la terre ; de croire qu’il peut nous donner à nous, qui sommes brûlés par la soif, une source d’eau vive, et d’aller à cette source, pour s’apercevoir combien l’imposture de l’Église est astucieuse et nos souffrances insensées quand notre salut est si près. Il suffit d’accepter franchement et simplement la doctrine de Jésus pour mettre au jour l’horrible mensonge dans lequel nous vivons tous et chacun en particulier.

Une génération après l’autre s’efforce de trouver la sécurité de son existence dans la violence et de se garantir ainsi la propriété. Nous croyons voir le bonheur de notre vie dans la puissance, la domination et l’abondance des biens. Nous sommes tellement habitués à cela, que la doctrine de Jésus, qui enseigne que le bonheur des hommes ne peut pas dépendre du pouvoir et de la fortune, et que le riche ne peut pas être heureux, nous semble exiger trop de sacrifices. C’est là une erreur. Jésus nous enseigne à ne pas faire ce qui est le pis, mais à faire ce qui est le mieux pour nous, ici-bas, dans cette vie. Poussé par son amour pour les hommes, il leur enseigne l’abrogation des garanties basées sur la violence, et l’abstention de la propriété, tout comme nous enseignons aux gens du peuple, dans leur propre intérêt, à s’abstenir des querelles et de l’in-