Page:Tolstoï - Plaisirs vicieux.djvu/35

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est mortel et qu’il va bientôt falloir cesser d’être, de faire partie de ce qui continuera cependant à être éternellement, sans le moindre souvenir de lui.

La terreur de la mort inévitable, dont il n’est plus séparé que par quelques années, l’envahit et l’étreint. De quoi va-t-il occuper ces dernières années, qui vont passer si vite ? Il commence à mesurer toutes les choses de la vie à cette fatale nécessité de la mort : elles lui apparaissent vides, dénuées de raisons d’être et sa fragilité l’humilie et le désespère. Le terrible « à quoi bon ? » de l’Ecclésiaste ne quitte plus son côté. S’il n’a pas quelque grand idéal comme l’illusion religieuse, l’amour de la science, la folie de l’art, la passion de la charité, une de ces ivresses de l’âme, il redescend dans l’instinct, il se met à vivre au jour le jour et il fait appel à la sensation immédiate, basse, mais assurée. Elle le tuera peut-être, mais qu’est-ce qui ne