Page:Tolstoï - Qu’est-ce que l’art ?.djvu/123

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DUELLUM

Deux guerriers ont couru l’un sur l’autre ; leurs armes
Ont éclaboussé l’air de lueurs et de sang.
Ces jeux, ces cliquetis du fer, sont les vacarmes
D’une jeunesse en proie à l’amour vagissant.

Les glaives sont brisés ! comme notre jeunesse,
Ma chère ! Mais les dents, les ongles acérés
Vengent bientôt l’épée et la dague traîtresse ;
Ô fureur des cœurs mûrs par l’amour ulcérés !

Dans le ravin hanté des chats-pards et des onces
Nos héros, s’étreignant méchamment, ont roulé,
Et leur peau fleurira l’aridité des ronces.

Ce gouffre, c’est l’enfer, de nos amis peuplé !
Roulons-y sans remords, amazone inhumaine,
Afin d’éterniser l’ardeur de notre haine !

Je dois ajouter, pour être exact, que le recueil des Fleurs du Mal contient des poèmes moins difficiles à comprendre ; mais il n’y en a pas un seul qui soit assez simple pour pouvoir être compris sans un certain effort ; et cet effort n’est guère récompensé, à l’ordinaire, car les sentiments exprimés par le poète ne sont pas beaux, et appartiennent en général à un ordre assez bas.

On sent toujours, en outre, que l’auteur est préoccupé de paraître excentrique et obscur. Et