sentiment éprouvé par l’auteur, il n’y en a pas la moindre trace dans tout cela. Et j’ajoute que jamais on n’a rien imaginé de plus anti-musical. C’est comme si on ressentait, indéfiniment, un espoir de musique, aussitôt suivi d’une déception. Des centaines de fois quelque chose de musical commence ; mais ces commencements sont si courts, si encombrés de complications d’harmonie et de timbre, si chargés d’effets de contrastes, si obscurs et si vite arrêtés, et ce qui se passe sur la scène est d’une fausseté si invraisemblable, qu’on a de la peine même à percevoir ces embryons musicaux, à plus forte raison à en être émus. Et par-dessus tout, du commencement à la fin, dans chaque note, l’intention de l’auteur est si sensible que l’on ne voit et n’entend ni Siegfried, ni les oiseaux, mais seulement un Allemand aux idées étroites, un Allemand dénué de goût et de style, et qui, s’étant fait une conception grossière de la poésie, travaille à nous transmettre sa conception par les moyens les plus grossiers et les plus primitifs.
On sait quel sentiment de méfiance et de résistance naît toujours en présence d’une œuvre, d’une prédétermination trop évidente de l’auteur. C’est assez qu’un conteur nous dise d’avance : « Préparez-