Page:Tolstoï - Qu’est-ce que la religion.djvu/21

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vivant, comme c’était à Rome. De sorte que la reconnaissance de l’égalité des hommes est une qualité générale, fondamentale de chaque religion. Mais puisqu’en réalité nulle part et jamais n’exista et n’existe l’égalité des hommes, alors, aussitôt que paraît une nouvelle doctrine religieuse, qui contient toujours en soi la reconnaissance de l’égalité de tous les hommes, aussitôt, des hommes pour qui l’inégalité était avantageuse, s’efforcent de cacher cette qualité fondamentale de la doctrine religieuse en la dénaturant. Ainsi fut fait, partout et toujours, quand parut une nouvelle doctrine religieuse, et le plus souvent ce n’était pas fait consciemment, mais seulement parce que les hommes dominants, riches, pour qui l’inégalité des hommes était avantageuse, — car elle leur permettait de conserver leur situation, — se sentaient le droit, devant la doctrine admise, de tâcher, par tous les moyens, d’attribuer à la doctrine religieuse une signification d’après laquelle l’inégalité serait admise. Et une telle dénaturation de la religion, d’après laquelle les dominants pouvaient se croire dans leur droit, transmise naturellement aux masses, inspirait aussi à ces masses que leur soumission à ceux qui dominent est une des exigences de la religion qu’ils professent.