Page:Tolstoï - Quelle est ma vie ?.djvu/89

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reconduisit jusqu’à la porte ; les gens qui se trouvaient dans le corridor entendirent parfaitement qu’elle me bénissait.

Il est probable que mes questions concernant la misère avaient excité les désirs. Quelques-uns nous suivaient. J’étais encore dans le corridor qu’on me demanda de l’argent. Evidemment, il y avait parmi ces gens des ivrognes qui provoquaient en moi un sentiment de dégoût. Mais après avoir donné à la vieille je n’avais pas le droit de leur refuser, et je recommençai à donner. Tandis que je donnais, on m’aborda de tous les côtés. Il y avait dans tout l’asile un mouvement extraordinaire. Sur les escaliers et dans les galeries, des gens affluaient et me suivaient ; au moment où je sortais dans la cour, un garçon se précipita d’un escalier et, se faufilant à travers la foule, dit vivement sans m’apercevoir : « Il vient de donner un rouble à Agafial » Il se mêla aux gens qui me suivaient en me demandant de l’argent. Ayant distribué toute lapetite monnaie, je descendis dans la rue et entraî dans une boutique pour demander qu’on me changeât dix roubles.

Là se reproduisit la même scéne qui avait eu lieu dans la maison de Liapine. Il y eut