dans la salle à manger. C’était le mari de la comtesse Tcharska, l’ancien ministre.
Il baisa galamment la main de sa femme.
— Ah ! Dimitri, bonjour ! — dit le vieux général en tendant à Nekhludov sa joue fraîchement rasée. — Depuis quand es-tu arrivé ?
— Non, il est impayable ! — dit à son mari la vieille comtesse. — Il veut que j’aille à la rivière battre mon linge, et que je ne me nourrisse que de pommes de terre ! Tu n’imagines pas quel nigaud il est devenu ! Mais tu feras bien, tout de même, de faire tout ce qu’il te demandera. À propos, on dit que Mme Kamenska est si désespérée qu’on craint pour sa vie : tu devrais aller lui faire une visite !
— Oui, c’est affreux ! — répondit le mari.
— Et maintenant, allez causer de vos affaires dans le fumoir. Moi, j’ai à écrire des lettres.
À peine Nekhludov était-il sorti de la salle à manger qu’elle lui cria d’y revenir auprès d’elle.
— Et à Mariette, veux-tu que je lui écrive ?
— Oui, s’il vous plaît, ma tante !
— Mais je laisserai en blanc l’explication de ce que tu as à demander à son mari au sujet de ta nihiliste. Et elle ordonnera à son mari de faire ce que tu lui demanderas, et il le fera. Mais, tu sais, ne crois pas que je sois sans pitié ! Elles sont toutes des monstres, tes protégées : mais je ne leur veux pas de mal. Que Dieu les garde ! Et maintenant, à ce soir. Ce soir, sans faute, tu viendras ! Tu entendras Kiesewetter ! Et puis, tu prieras avec nous ! Cela te fera beaucoup de bien. À ce soir, n’est-ce pas ?
II
Le comte Ivan Mikaïlovitch Tcharsky, l’ancien ministre, était un homme de convictions rigoureuses.
Ses convictions avaient consisté, dès la jeunesse, en