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Page:Tolstoï - Scenes de la vie russe.djvu/19

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son aiguille et se mit à rapiécer une chemise de son mari. Tandis que sa main se pressait, Matréma était en pensée avec son Sema, achetant la peau de mouton dont on ferait la fameuse pelisse.

— Mon Dieu, pourvu qu’il ne se laisse pas tromper, disait-elle en tirant nerveusement son aiguille. Le pauvre homme est sans malice aucune, un petit enfant le mènerait par le nez, et lui ne saurait même pas faire tort d’un cheveu. Certes, huit roubles d’argent ne sont pas une petite somme ; avec cela on a une riche pelisse, sans garnitures il est vrai, mais enfin une pelisse. Avons-nous assez souffert, l’hiver passé, sans pelisse ! Je ne pouvais aller nulle part, pas même jusqu’au ruisseau. Et il a tout pris en partant, tout, je n’ai plus rien de chaud à me mettre sur le corps. Il est parti de bonne heure ; que fait-il pour ne pas encore être rentré ? Ah ça ! mon petit trésor se serait-il peut-être arrêté au cabaret ?

Elle achevait son petit monologue quand des pas résonnèrent tout à coup sur l’escalier.

Matréma posa son ouvrage et se leva en hâte.