Page:Tolstoï Les Cosaques.djvu/125

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— C’est bon ! Adieu ! que le Seigneur veille sur toi ! »

Loukachka se remit en selle, et, sans passer chez Marianna, il sortit en caracolant dans la rue, où Nazarka l’attendait.

« Passerons-nous, demanda Nazarka montrant de l’œil, du côté du cabaret de Jamka ?

— Voilà une idée ! dit Lucas ; prends mon cheval, mène-le chez elle, et, si je tarde, donne-lui du foin. Je serai à la sotnia avant le jour.

— Le porte-enseigne t’a-t-il donné encore quelque chose ?

— Non ! je suis content de m’être défait de lui en lui donnant un poignard ; il avait envie du cheval », dit Lucas, quittant sa monture et remettant la bride à Nazarka.

Il se glissa sous la fenêtre même d’Olénine sans être vu et s’approcha de la cabane du khorounji.

Il faisait tout à fait obscur. Marianna, en chemise, peignait ses cheveux pour la nuit.

« C’est moi ! » murmura le Cosaque.

Le visage sévère et indifférent de Marianna s’anima quand elle s’entendit appeler. Elle ouvrit la fenêtre et se pencha en dehors, effrayée et heureuse.

« Que veux-tu ? dit-elle.

— Laisse-moi entrer pour un instant. »

Il lui prit la tête dans ses mains et l’embrassa.

« Causons, je t’en prie !

— Pourquoi radoter ? je t’ai dit, une fois pour toutes, que je ne te laisserais pas entrer. Pars-tu pour longtemps ? »

Il ne répondit pas et continuait à l’embrasser. Elle n’en demandait pas davantage.

« Je ne puis même pas t’embrasser à mon aise par la fenêtre ! disait Lucas.

— Marianouchka ! appela la vieille mère, qui est là ? »

Loukachka ôta vite son bonnet pour ne pas être reconnu et s’accroupit sous la fenêtre.