Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/225

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toute doctrine existent dans toutes les religions du monde, dans la religion des brahmines, de Confucius, du Bouddha, de Moïse comme dans la religion du Christ. Mais il en a été de la doctrine de Jésus comme de toutes les autres : judaïsme, bouddhisme, brahmanisme. Les hommes s’écartent de la doctrine qui règle la vie, et il se trouve toujours quelqu’un qui se charge de justifier ces écarts. Ces gens qui s’assoient, selon l’expression de Jésus, dans la chaire de Moïse, expliquent la partie métaphysique de telle sorte que les prescriptions éthiques de la doctrine cessent d’être considérées comme obligatoires, et sont remplacées par le culte extérieur, — par le cérémonial. Ce phénomène est commun à toutes les religions, mais jamais, me semble-t-il, il ne s’est manifesté avec autant d’éclat que dans le christianisme. Il s’y est manifesté avec plus d’éclat : 1o parce que la doctrine de Jésus est la doctrine la plus élevée ; je dis qu’elle est la plus élevée parce que la métaphysique et l’éthique, dans la doctrine de Jésus, sont si indissolublement liées l’une à l’autre, et se fondent si complètement l’une dans l’autre, qu’il est impossible de détacher l’une de l’autre sans dépouiller cette doctrine de sa raison d’être ; 2o parce que la doctrine de Jésus est par elle-même une protestation contre toute forme, c’est-à-dire la négation, non seulement du cérémonial judaïque, mais même de toute espèce de culte extérieur. C’est pourquoi, dans le christianisme, la séparation arbitraire de la métaphysique et de l’éthique devait complètement défigurer la doctrine et la dépouiller de toute espèce de sens. C’est ce qui est arrivé en effet. Cette séparation a commencé avec la prédication de Paul, qui ne connaissait qu’imparfaite-