Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/235

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son côté, il vit la princesse Barbe, très rouge, rire d’un air forcé en regardant fréquemment la baignoire voisine. Anna, frappant de son éventail fermé le rebord de velours rouge de la loge, regardait au loin avec l’intention évidente de ne pas voir ce qui se passait à côté d’elle. Quant à Iachvine, son visage avait la même expression que quand il perdait au jeu : les sourcils froncés, il ramenait de plus en plus sa moustache gauche dans sa bouche et regardait aussi la loge voisine.

Dans cette loge de gauche se trouvaient les Khartasov que Vronskï connaissait et avec lesquels Anna avait été aussi en relations. Madame Khartasov, une petite femme maigre, était debout dans sa loge, tournant le dos à Anna, et mettait une sortie de bal que lui tendait son mari ; son visage était pâle, mécontent ; elle semblait parler avec agitation. M. Khartasov, un gros monsieur chauve, jetait des regards sur Anna et tâchait de calmer sa femme. Quand celle-ci eut quitté la loge, le mari s’y attarda, cherchant à rencontrer le regard d’Anna pour la saluer. Mais elle ne voulut pas le remarquer et se pencha en arrière près de la tête rasée de Iachvine. Khartasov sortit sans avoir salué et la loge resta vide.

Vronskï ne comprit pas ce qui se passait entre les Khartasov et Anna, mais il se rendit bien compte qu’elle venait d’être humiliée. Il vit, à l’expression du visage d’Anna, qu’elle rassemblait