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CINQUIÈME JOURNÉE.


Nous avons eu un moment l’intention de gravir aujourd’hui le mont Joly, mais des nuages accumulés ce matin autour des cimes, et surtout le désir de passer dans la compagnie de MM. D… et C… une tranquille et oisive matinée, nous font renoncer à ce projet. D’ailleurs il y a des noms de montagnes qui attirent, qui enlèvent : le Géant, le Jorasse, le Crammont encore et le Brévent aussi, mais le mont Joly ! c’est un nom par trop bourgeois, et l’on s’accommode de n’en pas gravir les pentes, tout comme l’on se passe de monter au clocher pour y voir Pierre le sonneur ou Jacques le marguillier.

Les vallées et les cimes des Alpes de Savoie n’ont pas comme celles des cantons allemands de ces noms âpres à entendre, âpres à dire, mais expressifs de sons et de sens, et constituant, au moyen de terminaisons génériques, comme une classification naturelle des objets ou des formes auxquels ils s’appliquent. Ces horn, ces bach, ces thal, précédés de leur caractéristique pittoresque, comme Finsterarhorn, Vetterhorn, Matterhorn, Faulhorn, comme Giesbach, Staubach, Kanderthal, Simmenthal, conservent à la géographie suisse, même réduite à son simple vocabulaire, une vive et poétique empreinte des lieux, quelque chose aussi