Saint-G*** est chargé d’une masse de pleins pouvoirs dont chacun est restreint par trois instruendum ou détruit par six referendum. C’est égal ; arrivé à l’hôtel Féder, M. de Saint-G*** y descendra sans dételer, ensuite il entamera des négociations, et, le cas échéant, après en avoir conféré avec madame T***, il signera un traité. Le traité conclu, M. de Saint-G*** fera dételer, prendra possession, et expédiera une estafette.
C’est ensuite la voiture : le cocher devra tenir ses chevaux constamment fouettés, afin de soutenir l’allure, et lui-même aussi, afin de se tenir assez éveillé pour voir venir l’estafette. Puis, quand il aura reçu les ordres des députés, il se dirigera en conséquence.
Enfin c’est le gros des piétons. À ceux-ci il n’est enjoint rien d’autre que de marcher droit devant eux jusqu’à Rivoli, d’où ils feront de même jusqu’à Turin. Pleins d’ardeur, ils se mettent à l’œuvre aussitôt. Mais la chaleur est torride, et tout à l’heure ils auraient besoin de quelqu’un qui les tînt constamment fouettés pour soutenir l’allure et combattre la démoralisation.
M. R*** se cherche partout un bel arbre, mais n’en trouvant point, il propose à M. Töpffer d’entrer dans une guinguette, dont l’enseigne engageante promet toute sorte de limonades et rafraîchissements. Entrés, ils n’y trouvent à boire qu’un petit vin clairet. M. R*** s’en verse une rasade ; et il n’a que le temps d’arrêter du signe M. Töpffer, qui en va faire autant. « Ma, questo, dit-il en s’adressant au garçon, questo, mon ami, c’est de l’aceto, acetissimo ! — È buono vino. — Aceto, que je vous dico ! — Vino ! — Aceto ! — Vino ! — Aceto ! et allez vous promener, farcissimo que vous êtes ! »