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Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/86

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HUITIÈME JOURNÉE.


À Grenoble, toutes les estampes de l’auberge étaient troupières, grenadières, vieille garde ; ici, toutes ont tourné au sombre, au revenant, au vampire ; c’est à n’en pas dormir, d’autant plus que de tout petits vampires en nature y hantent les lits et y vivent sur le voyageur. Levés de bonne heure, nous courons sur Saint-Pierre d’Albigny, lieu fixé pour le déjeuner

Saint-Pierre d’Albigny est un hameau paisible, à demi caché derrière le feuillage des frênes et des noyers. À peine l’hôtesse nous a vus, qu’elle reconnaît en nous d’anciennes pratiques, bien que nous n’ayons jamais encore passé dans cet endroit ; et puis, comme c’est à ce titre qu’elle prétend nous régaler de son mieux, nous n’avons garde de la tirer de son erreur. C’est du reste une forte femme, à grande coiffe, à grande poitrine, à grand pourtour, mais la voix claire et gazouillante ne répond point malheureusement à l’ampleur de ces proportions. Sans perdre de temps, elle nous installe dans une immense chambre, vraie salle à manger de Savoie, où se heurtent les choses d’auberge et les choses de culture, de récolte ou de basse-cour. À l’angle, des sacs d’avoine ; devant la cheminée, des graines éparses sur des planches ; plus loin, une lessive qui sèche ; partout