Aller au contenu

Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

écoles. C’est là que se ravive l’âme desséchée sur les bouquins ; elle fait halte pour se reconnaître ; elle finit sa vie d’emprunt pour commencer la sienne propre. Ainsi un été entier passé dans cet état ne me paraît pas de trop dans une éducation soignée. Il est probable même qu’un seul été ne suffirait point à faire un grand homme : Socrate flâna des années ; Rousseau jusqu’à quarante ans ; La Fontaine toute sa vie.

Et cependant je n’ai vu ce précepte consigné dans aucun ouvrage d’éducation.




Ces pratiques dont je viens de parler sont donc la base de toute instruction réelle et solide. En effet, c’est pendant que les sens y trouvent un innocent aliment, que l’esprit contracte le calme d’abord, puis la disposition à observer ;


Car, que faire en flânant, à moins que l’on n’observe ?


puis enfin, par suite et à son insu, l’habitude de classer, de coordonner, de généraliser. Et le voilà tout seul arrivé à cette voie philosophique recommandée par Bacon, et mise en pratique par Newton, lequel un jour, flânant dans son jardin et voyant choir une pomme, trouva l’attraction.

L’étudiant à sa fenêtre ne trouve pas l’attraction ; mais, par un procédé tout semblable, à force de regarder dans la rue, il lui arrive au cerveau une foule d’idées qui, vieilles ou neuves en elles-mêmes, sont du moins nouvelles pour lui, et prouvent clairement qu’il a mis son temps à profit.

Et ces idées venant à heurter dans son cerveau ses anciennes idées d’emprunt, du choc naissent d’autres