Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/198

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment en cet instant… Je remercie Dieu de ce qu’il vous a conservé. Si le hasard ne m’eût fait rencontrer monsieur Jules, mon intention était de ne point quitter Genève sans avoir été chercher de vos nouvelles… mais il m’est plus doux de vous voir bien portant comme vous paraissez l’être, et je suis aussi reconnaissante que confuse de ce que, pour me procurer ce plaisir, vous êtes monté jusqu’ici.

— Bonne madame, dit mon oncle, vous êtes une charmante créature ! et c’est plaisir que de vous entendre… À Lausanne, il monta bien, votre père… et il n’en fut pas payé par cet accueil qu’on ne sait faire qu’avec votre voix, vos manières et votre cœur… Chère madame, soyez heureuse… Bientôt, bientôt, je monterai plus haut encore !… si ce n’est que voici mon pauvre Jules qui n’y consent pas…

— Ah ! toujours moins, bon oncle, lui dis-je, tout ému du rapport aussi triste que frappant qu’il y avait maintenant entre ma situation et celle où j’avais vu autrefois Lucy. Et je lisais dans l’expression de cette jeune dame que sa pensée en cet instant rencontrait la mienne.

— Que je ne vous dérange point, reprit mon oncle après quelques propos. Vous regardiez les essais de mon pauvre Jules… je vais vous laisser… Dites, je vous prie, à monsieur que je regrette aujourd’hui de ne pas savoir l’anglais plutôt que l’hébreu… j’aurais eu le plaisir de l’entretenir. Puis, prenant la main de Lucy : — Adieu, dit-il, mon enfant… soyez heureuse… C’est le droit d’un vieillard que d’accompagner de ses bénédictions une aussi jeune dame… ainsi fais-je. Adieu, cher monsieur ; vous êtes unis… je ne vous séparerai plus dans mon souvenir. À ces mots mon oncle Tom, s’étant incliné de nouveau, baisa la main de Lucy, et