Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/309

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pourrions avoir de l’orage. C’est mauvais par là-haut à cause des neiges. Et puis, c’est pas l’ombrelle de cette demoiselle qui la tirerait de là.

Cette façon cavalière de s’exprimer choquait visiblement milord. Avant de répondre, il entama avec sa fille un colloque en anglais. Pour la clarté du récit, je reproduis ce colloque dans cette sorte d’idiome qu’emploient entre eux les Anglais lorsqu’ils conversent en français.

Milord à sa fille : Cette guide avé iune très-irrévérencious manière.

— Il me paraisse iune stiupid. Disé à lui que je ne voulé paartir que si la ciel n’avé pas iune niuage.

Milord au guide : Je ne voulé paartir que quand la ciel n’avé pas iune seule niuage.

— Eh bien, c’est pas ça ! repartit le guide. De grand matin il y aura des nuages, je vous en préviens ; et tout de même il faut partir de grand matin. Laissez donc, nous connaissons le temps et les endroits, nous autres !

Milord à sa fille : C’été iune fourbe. Au guide : Je disé à vos que je ne voulé paartir que quand la ciel n’avé pas iune iunique niuage.

— Comme vous voudrez, ça vous regarde. Je parie que le ciel sera découvert vers neuf heures ! Une supposition : vous partirez à neuf heures, mais je vous dis que vers midi il veut faire de l’orage, et à midi nous serons justement au milieu des neiges ; au lieu de cela, si nous partons de grand matin, à midi nous sommes à Sixt, et vienne la tourmente alors !

Milord à sa fille : C’été iune fourbe. Comprené-vous la chose, Clara ? Il connaissé qu’il faisé mauvais temps démain, et il voulé nous engager à commencer le jour-