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QUATRIÈME PARTIE

la générosité par ses doléances, par ses prétentions. Certes, aux premiers mois de la guerre, dans la confusion du début, on avait envoyé aux bouges de White Chapel des professeurs, des artistes, des bourgeois timides qui n’avaient pu se résigner à l’affreuse populace de ce quartier londonien. Mais, à présent que l’affluence des fugitifs se réduisait à cinq mille par semaine, on tâchait de les répartir plus équitablement.

C’étaient, pour la plupart, des ouvriers, des paysans que la Hollande, accablée sous leur nombre, expédiait en Angleterre. Mais la charité anglaise commençait à se lasser. Les logements devenaient rares, il n’en restait guère à choisir. Aussi la bonne Mrs VVood laissait-elle à Philippe et à Lucienne le soin d’assembler différentes familles, désireuses de vivre sous le même toit. On n’en trouvait pas.

Des employés, des boutiquiers, des gens de condition modeste, se refusaient à loger en commun, fût-ce dans un château.

— Si vous aviez plutôt une petite maison…

— Justement… Il n’y en a plus.

Les femmes se toisaient, refrognées à la perspective d’un ménage organisé pour vingt personnes.

— Mais alors, qui fera la cuisine ?

— Et qui tiendra les comptes ?

— Voyons !… Un peu de complaisance mutuelle ! On vous offre une grande maison de campagne, la lumière, le charbon. Un comité s’occupera de la nourriture. Il