Page:Touchatout - Le Trombinoscope, Volume 1, 1871.djvu/80

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quitter l’État de Gênes ; mais il le retrouva très aisément en France où il dut se faire professeur de mathématiques pour vivre.

Après un court séjour dans la flotte du bey de Tunis, il fut investi du commandement en chef d’une escadre par la République de l’Uruguay. Fait prisonnier, il s’évada et organisa contre Buénos-Ayres des corps de partisans italiens dont le négligé de la toilette eût fait mourir de rire le correct Trochu ; mais qui, à défaut de capotes ouatées, se couvrirent de gloire. — En 1848, il revint combattre pour la liberté italienne, fut nommé député du Piémont par l’opposition, et lorsque l’année suivante la République fut proclamée à Rome, il se mit à la tête de sa légion pour combattre le général Oudinot, envoyé par la République française pour anéantir la République romaine, ce qui, par parenthèse, ne paraîtra pas à l’histoire d’une logique bien serrée. — Il soutint le siége de la ville et brûla en trente jours huit cents fois moins de cierges et trois mille fois plus de poudre que le général Trochu ne devait le faire plus tard en six mois. — Il ne fit pas communier ses troupes tous les trois jours ; mais il se fit blesser au combat. — À la dernière extrémité, il proposa de faire sauter les ponts et de combattre jusqu’à la mort. Rome s’y refusa, circonstance qui a permis à Trochu de s’excuser de sa mollesse en répondant à ceux qui lui opposaient cette comparaison : Je ne pouvais proposer à Paris de pareils moyens, sachant d’avance qu’il les accepterait. — Il s’échappa de Rome et s’embarqua pour Gênes. — De là, il repartit pour l’Amérique, où il prit, dit-on, une fabrique de chandelles, de chandelles romaines probablement.

Le Gaulois et le Figaro se sont réjouis longtemps par d’aimables ricanements qu’un militaire ait put devenir négociant par nécessité ; il est vrai que lorsque, plus tard, ils virent des négociants essayer de se faire soldats par devoir, ils en ricanèrent pour le moins autant ; il ne faut pas s’en étonner, le mérite spécial de ce genre de presse est d’affecter de croire qu’un pays ne peut être sauvé que par des soudards dorés sur tranches, et de nier qu’un fabricant de chandelles puisse jamais avoir autant de patriotisme que le maréchal Bazaine. — En 1859, il revint se mettre à la disposition du Piémont, fut nommé en mai major-général et combattit comme un lion excitant l’enthousiasme de l’Europe entière, excepté Veuillot. — La paix de Villafranca lui procura le juste prix de son dévouement ;