bancs de l’opposition, ce qui ne l’empêche pas d’appuyer plus tard le cabinet Ollivier au cœur léger, d’heureuse mémoire. Après le 4 septembre, M. Thiers fut chargé par le gouvernement de la défense nationale d’aller finasser au nom de la République auprès de toutes les cours étrangères et d’obtenir leur appui contre la Prusse ; il revint de ce voyage avec un chargement complet d’humiliations pour la France républicaine, ce qui lui valut d’être élu vingt fois à l’assemblée nationale par la France monarchique. Après la conclusion de l’armistice, nommé immédiatement chef du pouvoir exécutif, il fit voter la paix glorieuse que l’on sait, et eut le talent de convaincre le pays que sans son intervention la Prusse eût exigé trente-huit milliards et la cession de la Lorraine jusqu’à la Méditerranée. — Une fois au pouvoir, le premier soin de M. Thiers fut de chercher le moyen d’agacer Paris, dont il redoutait les tendances républicaines, pour avoir une occasion de le désarmer ; il prit d’abord comme ministres les membres de la défense nationale les plus réprouvés par l’opinion publique : Jules Favre, Jules Simon et Picard ; il laissa retirer de Paris le siége de l’Assemblée en récompense du patriotisme que la capitale avait montré pendant le siége, et provoqua enfin le mouvement de violence sur lequel il comptait en tentant de reprendre nuitamment des canons que la garde nationale avait retranchés sur la butte Montmartre pour les soustraire aux Prussiens. M. Thiers avait cherché une petite émeute, il trouva une formidable insurrection et fut obligé de fuir à Versailles avec son gouvernement. Là, il organisa le siége de Paris. — Vainqueur de l’insurrection, il fit désarmer la capitale jusqu’au dernier cure-dent, ce qui lui permit de risquer en toute sécurité et en pleine tribune sa fantaisiste théorie de la « République avec présidence héréditaire, » qui sera, nous l’espérons, son dernier chef-d œuvre.
M. Thiers est de petite taille et de plus petit génie encore. Il parle pendant six heures sans avoir besoin d’être remonté, a pour tic de traiter poliment de moutards les députés qui n’ont que soixante-cinq ans et n’a pas son pareil pour répondre quand on lui demande s’il maintiendra la République : « Je vous donne ma parole d’honneur que le veau à l’oseille ne me réussit généralement pas. » M. Thiers est dans sa soixante-quinzième année. —