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Choumara. Ils n’auraient eu qu’à se baisser vivement en voyant arriver le cimeterre, le bourreau cueillait la tête en carton, et un sourire frais et rose revenait enfin de temps en temps sur le visage alangui du shah, notre hôte. — Il nous reste à parler de la fameuse collection de talismans de Nasser-ed-din. Elle se compose de deux cents pièces ; nous nous bornerons à signaler les principales. Nous avons, d’abord, Mirzoum, étoile d’or et de diamants à cinq branches, qui possède la propriété de faire avouer les crimes. C’est à l’aide de cette étoile que Nasser-ed-din obtint un jour des aveux complets de son frère qu’il accusait d’avoir conspiré contre lui. Il n’eut qu’à lui dire : « Tu vois cette étoile !… Eh bien, si tu ne confesses pas jusqu’aux crimes que tu n’as pas eu l’intention de commettre, je te fais ouvrir le ventre avec. » L’influence du talisman fut telle que le frère se mit à avouer tant de forfaits, qu’on fut obligé de l’interrompre ; deux secondes plus tard, il déclarait avoir contribué au déboulonnement de la colonne Vendôme. — Vient ensuite Hydaeb qui orne le pommeau de l’un des cimeterres du shah et qui rend invisible. Nasser-ed-din s’en sert quand il est en omnibus, pour que les femmes qui y montent après lui viennent s’asseoir sur ses genoux, croyant la place vacante. Immédiatement, le voyageur qui est à son côté et qui ne se doute de rien, reçoit une paire de gifles soignées ; ça fait des histoires à chaque instant. — Le shah possède encore une tabatière en émeraudes qui a la vertu d’empêcher celui qui la porte d’entendre le piano ; il le prend toujours quand il va en soirée. — Enfin, Nasser-ed-din porte constamment pendu a son cou un talisman très-précieux qui lui permet, assure-t-on, de ne jamais rester court dans une conversation. Si l’expression lui manque, il n’a qu’à presser un petit bouton du médaillon, le mot arrive net et rapide et le bégaiement cesse. La vertu de ce talisman n’est mise en doute par personne à la cour du shah ; seules, ses trente-cinq femmes semblent ne pas y croire beaucoup.

Juillet 1873.

NOTICE COMPLÉMENTAIRE

DATES À REMPLIR
PAR LES COLLECTIONNEURS DU TROMBINOSCOPE

Nasser-ed-din retourne à Téhéran, le... 18..., après avoir visité Paris et s’être fait présenter à Offenbach dont il conjure le mauvais œil avec un talisman spécial. — Quelques jours après son arrivée en Perse, il se souvient que, pendant son séjour à Paris, il a passé la soirée chez une jeune et jolie artiste d’un théâtre de genre, et que, ce jour-là, il avait précisément oublié de prendre son Ahmerad. Il le déplore le... 18... et jours suivants. — Il continue à gouverner son peuple en bon père de famille… qui vit de ses enfants, et enfin, meurt le... 19..., en essayant un nouveau talisman qui devait lui permettre de lire le Figaro sans vomir.


LA BIOGRAPHIE, 15 CENTIMES. — PROVINCE, SOUS BANDE, 20 CENTIMES.

Paris. — Imprimerie F. DEBONS et Ce, 16, rue du Croissant.