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Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/129

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cause de vos talons hauts. Vos cheveux sont si pesants qu’ils vous tirent la tête en arrière ; et votre visage, dans le demi— jour, devient éclatant comme une fleur (Lœtitia bâille).

— Ou bien, nous remonterions les Champs-Élysées, le long de ces allées sinueuses qui contournent des massifs. Il me semble qu’on y doit déjà respirer le printemps, un avant-parfum à peine. C’est ainsi que, l’an dernier, un soir que je vous attendais sur la terrasse des Tuileries, accoudé sur la balustrade à regarder couler la Seine, je fus averti de votre approche par une faible odeur de violettes qui volait devant vous.

— Vous en avez un flair, baron.

— C’est vrai que vous-même, enfant de Montparno, n’êtes point sensible à ces harmonies de la nature. Vous n’avez pas, — comme la Colette Willy, de Retraite Sentimentale — le don délicieux de ressentir et de décrire cette amoureuse sensualité qu’il y a au fond de l’atmosphère à certains jours : ni de boire à pleines narines la ferveur d’un sol trempé de pluie, et les feuilles au parfum multiple (Lœtitia hausse les épaules).

— Tout ça, voyez-vous, c’est de la littérature.

— Je ne dis pas non — mais de la bonne, celle qui nous découvre les vérités et les sources cachées. Et puis, si c’est votre idée, on n’ira pas aux Champs-Élysées, voilà tout. Nous choisirions plutôt un quartier populeux et provincial. Autour de la Madeleine, par exemple, lieu plein de contrastes, il y a des rues comme ça, où s’ouvrent des Passages. Déjà les gens s’attardent sur leur porte, et regardent passer l’omnibus.