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Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/76

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C’était, du reste, un homme singulier que ce parrain d’Euphrasie. Quoiqu’il se contentât dans la vie courante de représenter cette grosse maison de linoléum, qui a fait perdre tant d’argent à ses commanditaires, la maison… (enfin, peu importe le nom), il y aurait à conter de lui les histoires les plus inattendues. C’est ainsi que, se trouvant un soir dans le faubourg d’une ville de province, devant un vieil hôtel isolé, il entendit soudain, à travers l’épaisseur des murailles, de violents coups de marteau, apparemment frappés contre des planches, auxquels succéda un grand cri (« tout à fait le cri de Mme du Barry sur l’échafaud… », disait-il), accompagné presque aussitôt d’âcres éclats de rire. N’écoutant que son courage, l’intrépide voyageur en linoléum se rua contre la porte pour l’enfoncer. Peine perdue ! Et il dut s’avouer bientôt que tous ses efforts étaient inutiles : la porte était entrouverte. Se précipiter dans la cour de l’hôtel n’était plus qu’un jeu pour lui, et, là, quelle ne fut pas sa surprise en apercevant…

Mais, revenons à notre sujet.

Honoré Beaubu l’était lui-même à la jalousie la plus inexorable qui ait jamais exercé ses ravages dans le corps des conducteurs d’autobus, où il tenait une place importante, chargé comme il était de diriger une de ces célèbres Carnavalet-Buttes Chaumont, dont l’éloge n’est plus à faire, et qui charroient chaque jour, à travers les mille hasards d’un parcours dédaléen, l’amas des voyageurs tremblants. Beaubu était aimé dans sa compagnie et possédait l’estime de ses chefs. Il passait auprès d’eux pour un des plus vaillants parmi ces