l’Italie. Car chaque pays a la sienne. C’est ainsi que l’Angleterre sent la marmelade et les houilles éteintes, tandis que l’Espagne est toute odorante de sang, de fleurs corrompues, de sueur ; et pour l’Allemagne je n’en sais rien, sinon que la chambre de Fräulein exhalait le parfum du café au lait refroidi.
Mais Nane est insensible à ces nuances. Aussi ne lui parlerai-je point des petits ports hindous, où l’on respire le safran et le poisson salé ; ni du Maroc, empire fleuri, aromatisé de jonquille ; non plus que de cette île créole qui répandait au loin, sur la mer nocturne, l’âme des cassies et des gérofliers.
D’ailleurs mon amie avait été plutôt âpre à me reprendre sur mon attitude à la douane. Elle a entrepris depuis peu de refaire mon éducation, bien différente de ce qu’elle était jadis sous la lune de miel, attentive alors à me découvrir sans cesse quelque perfection nouvelle. Je l’entendais, par exemple, me dire tout à coup :
— Comme vous avez le pied petit.
— Je l’ai plutôt mince, répondais-je avec complaisance, tout près de piaffer.
Et Nane répétait docilement :
— C’est vrai, plutôt mince.